- voiturer
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• 1270 intr. « aller en Terre sainte »; de voiture1 ♦ (1611) Vx Transporter; apporter. « Voiturez-nous ici les commodités de la conversation » (Molière) :apportez-nous les fauteuils.2 ♦ Mod. Transporter dans une voiture. ⇒ véhiculer. « Leur table se couvrait de raviers bariolés et l'on voiturait un jambon dans sa conque de métal » (Chardonne). — Spécialt Transporter (des personnes). Pronom. « Le meilleur carrosse pour se voiturer dans la vie » (Flaubert). — Fam. Transporter, mener en voiture, en automobile.Synonymes :- véhiculer⇒VOITURER, verbe trans.A. — 1. Vieillia) Transporter des êtres animés, des objets. Les bouchers, avec de grands tabliers blancs, marquaient la viande d'un timbre, la voituraient, la pesaient, l'accrochaient aux barres de la criée (ZOLA, Ventre Paris, 1873, p. 631). Chaque matin, il voiture [l'âne], d'un petit pas sec et dru de fonctionnaire, le facteur Jacquot qui distribue aux villages les commissions faites en ville (RENARD, Hist. nat., 1896, p. 98).— Fréq. au passif. Puis les magasins d'eaux-de-vie, les dépôts de toutes les matières premières voiturées par la rivière, enfin tout le transit borda la Charente de ses établissements (BALZAC, Illus. perdues, 1837, p. 37). On saisit, dans un enfant porté à bras, cette juste proportion entre l'enfance, qui ne sait pas vivre, et l'humanité, qui garde l'enfance. Aussi voit-on partout (...) l'enfant heureux ou l'enfant dormant, transporté, voituré, aussi tranquille dans ce geste enveloppant que dans son berceau (ALAIN, Propos, 1925, p. 663).— P. plaisant. L'ardoise réglée, ils déambulaient le ventre tiède, à petits pas, de la démarche prudente de ceux qui voiturent une digestion (ARNOUX, Gentilsh. ceinture, 1928, p. 87).b) Se laisser, se faire voiturer. Se faire transporter. [Les rémoras] se collent à eux [les navires] pour se faire voiturer sans fatigue (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 201). Dans une tranquillité parfaite, tels les petits de la sarigue, ils se laissent doucement voiturer (COUPIN, Animaux de nos pays, 1909, p. 386).c) P. anal., poét. Emporter, véhiculer sur une certaine distance. Cette poussière est si volatile, qu'elle s'élève aux sommets des plus hautes montagnes (...); broyée par la mer, échauffée par le soleil, et voiturée par les vents, elle renferme les premiers éléments de la végétation (BERN. DE ST-P., Harm. nat., 1814, p. 229).2. Littér. [P. allus. aux Précieuses ridicules, scène 9] P. iron. Apporter un objet à un endroit précis. V. commodité A 2 b rem. ex. de Morand.3. Au fig. Véhiculer des faits, des idées. Cette influence, nous ne la recueillions pas seulement dans son œuvre. Toute la littérature de ces années-là la voiturait jusqu'à nous (J.-R. BLOCH, Dest. du S., 1931, p. 76).B. — 1. Transporter d'un point à un autre dans un véhicule roulant attelé, à bras ou automobile, des personnes, des objets. Synon. véhiculer.a) [Le suj. désigne l'animé qui fait fonctionner le véhicule] Il me voiture d'une première à une autre, et crie bien haut que le théâtre l'assomme (COLETTE, Cl. ménage, 1902, p. 115). Vous passez en automobile et j'ai pas de quoi louer les chevaux pour voiturer mon fumier (HAMP, Champagne, 1909, p. 132).— En partic. Déplacer une personne dans un fauteuil d'infirme. Un domestique la voiturait [une dame âgée], aux minutes de soleil, dans un petit chariot roulant (BOURGET, 2e amour, 1884, p. 204). Transporter (un objet) sur un chariot, une table roulante. Aussitôt leur table se couvrait de raviers bariolés et l'on voiturait un jambon dans sa conque de métal (CHARDONNE, Dest. sent., III, 1936, p. 244).— Se faire voiturer. Se faire transporter quelque part. Une voiture au Caire est un luxe d'autant plus beau, qu'il est impossible de s'en servir pour circuler dans la ville, (...) le pacha lui-même (...) ne peut se faire voiturer qu'à ses diverses maisons de campagne (NERVAL, Voy. Orient, t. 1, 1851, p. 256). P. plaisant. S'aller voiturer. Se faire transporter dans un véhicule. N'empêche que c'est à moi que ça arrive, moi qu'étais si heureuse, si contente et tout de m'aller voiturer dans lmétro (QUENEAU, Zazie, 1959, p. 14).b) [P. méton. du suj.] Le fugitif, prenant le même chemin qu'avaient suivi les chariots qui voituraient son trésor, se dirigea vers la ville de Bourges (THIERRY, Récits mérov., t. 2, 1840, p. 299). Dans sa chambre, comme dans le fiacre qui le voiturait de quartiers en quartiers, il eut le courage de s'interroger avec franchise (BOURGET, Crime am., 1886, p. 185).2. Au passif. [Avec un agent animé non exprimé] Être transporté, véhiculé. Après ces montagnes (...), commencèrent d'immenses tourbières, où la tourbe était coupée, séchée, voiturée (MICHELET, Journal, 1834, p. 140). Les deux femmes voiturées laissaient paresseusement leur venir de grands et longs silences (GONCOURT, Mme Gervaisais, 1869, p. 156).3. Empl. pronom. Se rendre quelque part, se déplacer. Il sera bon pour moi de converser quelque temps avec ce vieux gars que je me figure souvent se voiturant dans les rues de Paris, le cigare au bec (FLAUB., Corresp., 1839, p. 50).REM. Voiturable, adj. Que l'on peut transporter, voiturer. Synon. transportable. [Madame de Tascher] est bien tourmentée de la santé de sa fille (...) Dès qu'elle sera voiturable, la mère l'emmènera en Italie par le Simplon (SAINTE-BEUVE, Corresp., t. 5, 1843, p. 219).Prononc. et Orth.:[], (il) voiture [-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1240-80 intrans. « faire le voyage de la Terre Sainte » (BAUDOIN DE CONDÉ, Contes dou pel, 305 ds Dits et contes, éd. A. Scheler, p. 11), attest. isolée; 2. 1543 trans. voitturer « transporter des objets dans un véhicule » (Comptes, devis et inv. du manoir archiépiscopal de Rouen, éd. L.-A. Jouen, 463); 1606 « transporter des marchandises ou des personnes dans un véhicule » (NICOT, s.v. freter). Dér. de voiture; dés. -er. Fréq. abs. littér.:40.DÉR. Voiturage, subst. masc., vx. Transport par voiture et, p. ext., action de voiturer. C'est de plus une des denrées [le blé] les plus lourdes et les plus encombrantes comparativement à son prix; une de celles, par conséquent, dont le voiturage et l'emmagasinement sont le plus difficiles et le plus dispendieux (SAY, Écon. pol., 1832, p. 210). — []. — 1re attest. 1358 (Li contes des frais p. le nouv. cloque, V, A. Valenciennes ds GDF. Compl.); de voiturer, suff. -age.voiturer [vwatyʀe] v. tr.ÉTYM. 1611 au sens 1; 1270, v. intr., « aller en Terre Sainte »; de voiture.❖1 Vx. Transporter. → 1. Air, cit. 19, La Fontaine. — Apporter. || « Voiturez-nous ici les commodités (cit. 5) de la conversation (les fauteuils) » (Molière).2 Mod. Transporter dans une voiture. ⇒ Carrosser (1.), charrier, véhiculer. — Spécialt. Transporter (des personnes). — Fam. Transporter dans une voiture (automobile).1 Mais le pacha lui-même est obligé de tenir ses remises près des portes, et ne peut se faire voiturer qu'à ses diverses maisons de campagne (…)Nerval, Voyage en Orient, Femmes du Caire, III, VI (1851).♦ Pron. || Le meilleur carrosse pour se voiturer dans la vie. → 1. Muse, cit. 9.♦ Par ext. Transporter (qqch.) dans une petite voiture, sur une table roulante, etc. ⇒ Rouler.2 (…) leur table se couvrait de raviers bariolés et l'on voiturait un jambon dans sa conque de métal.J. Chardonne, les Destinées sentimentales, p. 487.
Encyclopédie Universelle. 2012.